Un refit électrique pour Lucy


Je n’avais pas initialement prévu de me lancer dans l’aventure d’un refit electrique complet. Je pensais naïvement sous traiter cette partie à des spécialistes. Rendez vous fut donc pris avec une entreprise du domaine ayant pignon sur rue et plutôt bonne réputation.

Résultat des courses, un devis a plus de 50k€ et surtout un très mauvais contact avec le gérant qui était plus occupé à me prendre de haut qu’à écouter mes désiderata sur notre future installation éléctrique. Saupoudrez quelques affirmations relevant soit de la malhonnêteté soit de l’incompétence (exemple; il serait selon ce monsieur impossible d’avoir un speedo à ultrason sans passer par un traceur NKE), et vous aurez les raisons de mon choix : quitte a ce que le résultat ne soit pas parfait, je préfère autant qu’il soit imparfait à ma façon, ce qui ne pourra que payer des dividendes quand une partie critique de notre installation décidera de rendre l’âme au pire moment possible.

Et bien entendu, économiser 30k€ de main d’oeuvre (+ 5k€ de marge sur les produits) n’est pas non plus une idée intrinséquement déplaisante. Me voila lancé pour un refit complet de l’electricité.

Faut il repartir d’une page blanche ?

Qu’il est dur de se décider. Coté pile, tout est plus simple quand on a pas à composer avec un existant un peu boiteux, pas vraiment documenté. Coté face, c’est toujours un crève coeur d’enlever un cable tout en sachant qu’on en repassera probablement un identique quelques semaines plus tard, et la tentation est donc grande de le garder. Le problème c’est qu’avec cette approche, on ne s’en sort pas (en tout cas je me suis retrouvé noyé sous la complexité de l’existant, mais je ne doute pas que des esprits supérieurs ici ou là auraient avantageusement conservé les morceaux utiles tout en bazardant le reste)

Finalement après pas mal de tergiversations, j’ai décidé de ne rien garder. ouf !

Faut il faire un schéma ?

Oui, mille fois oui. Le roi du domaine est clairement Visio, mais cette petite merveille n’existe que sous windows et j’ai un mac, et je me suis donc rabattu dur draw.io qui fait à peu près l’affaire. Mes reproches? Principalement l’incapacité à gérer correcteement les labels sur les liaisons (comme le fait visio).

Voila un petit extrait du mien à titre d’exemple, je détaillerai par la suite.

 

Est-ce rentable de faire soi même ?

 Pas forcément évident de répondre parce que ca dépend évidemment de votre degré de compétence, mais je peux vous donner deux éléments de réponses.

Tout d’abord, sur les prix.

J’ai envisagé de sous traiter un petit bout du chantier (le remplacement du propulseur d’étrave qui était dans un état lamentable).

Mon estimation (qui s’est avérée réaliste) :

  • un propulseur MaxPower VIP 150 a 7500€ sur internet (je viens même de le trouver a 6600€ en fouillant un peu)
  • 500€ de matos divers et varié (cable de puissances, fusibles, boitiers electriques étanches, etc)
  • 1 jour de travail pour enlever l’ancien propulseur et réinstaller le nouveau
  • 2 jours de travail pour refaire au propre tout le circuit electrique du guindeau et du propulseur qui en a bien besoin

Dans le devis, des pros, on retrouve 4 jours de main d’oeuvre (a 90€ de l’heure, ca pique un peu : 3000€), mais surtout, le propulseur m’est facturé 11.500€ ! Et la c’est toujours le même dialogue :

– « Vous pouvez pas comparer les prix parce qu’avec nous l’installation est garantie pièces et main d’oeuvre, si il y a un problème dans 6 mois on se déplace et tout est prix en charge, et bien sur ca a un cout »

– « Ok, je comprend, dans ce cas, je fournis le propulseur et je vous exhonère de votre garantie »

– « Et bien shrchhrhr rrhrh je passe dans un tunnel scrrrr tuut tuut »

Ensuite, il y a le sujet qualité de l’installation

Quand nous avions acheté Lucy, il y a maintenant presque 10 ans (et voilà, j’avais prévu de dire du mal du professionnel du nautisme, et je me retrouve en pleine crise existencielle sur le temps qui passe inexorablement, ca m’apprendra a pas respecter les accords toltèques….). Je reprends. A l’époque, nous n’y connaissions pas grand chose et nous avons donc fait appel à une autre entreprise d’electrique mariine ayant pignon sur rue et très bonne réputation sur les pontons pour quelques menus travaux, en particulier installer un deuxième pilote automatique

Pour que tout soit clair, je me permets ici une petite digression sur notre installation. A l’époque, nous avions un circuit assez classique avec une barre hydraulique connectée à un des deux safrans, un pilote connecté au même safran, et bien sur les deux safrans mécaniquement connectés l’un à l’autre. A l’époque, Sarah avait aussi un couple d’amis qui s’était retrouvé en panne de pilote entre les gualapaguos et l’île de Paques, en pleine lune de miel, et bref le pilote de backup était très haut sur notre todo list.

Le pilote en question n’a jamais vraiment marché :

  • l »installation electrique n’était pas complètement triviale car il faut que le deuxième pilote court circuite le circuit hydraulique du premier. Ca implique d’alimenter un electrovanne qui va shunter le circuit principal via un relais qui au passage en profite pour activer le circuit du pilote auxiliaire. La bonne manière de faire est d’installer un relais bipolaire pour alimenter les deux vannes en même temps. Ou alors, on peut économiser les 30€ du relais et mettre des wagos dans tous les sens. Ca marche aussi mais c’est moche et surtout compliqué à comprendre quand on repasse sur l’installation (pour laquelle aucun schéma n’a été fourni) 8 ans plus tard….
  • l’installateur a opté pour un vérin avec pompe hydraulique intégrée, ce qui simplifie beaucoup l’installation mais expose la pompe aux éléments. Il a donc fallu changer les charbons au bout de quelques mois…
  • … mais ce n’est pas très grave car de toute façon le pilote zigzaggait dès que la mer n’était pas parfaitement plate. J’ai fini par comprendre pourquoi il y a peu en préparant les schémas electriques de la nouvelle installation. Ces messieurs avaient installé le gyro-compas à l’arrière du voilier alors qu’il est indiqué en rouge dans le manuel que celui ci doit absolument être placé en avant du mat. Il est vrai que le cable de 5m fourni par le constructeur rend cette installation impossible à réaliser sans l’achat d’une rallonge a 39€90, rallonge qui m’aurait probablement été facturée 246€ si je me réfère aux marges habituelles dans cette industrie

J’ai pris l’exemple du pilote, mais j’aurais pu vous parler du webasto installé avec la prise d’air principale dans les toilettes (parce que c’était plus simple!), ou du chargeur usb pris à l’arrache sur l’alimentation de puissance du winch, des cables non marqués un peu partout, etc..

Conclusion : Les pros de l’electricité marine, c’est à réserver aux situations ou vous êtes riches, pressés, et jamais trop loin des côtes ! Pour tous les autres, il faut apprendre à faire soi même

 

 

Combien de temps ca prend ?

Qu’il est dur de répondre à cette question…  La boite qui m’a fait un devis m’avait dis 2 personnes à plein temps pendant un mois. Je n’ai malheureusement pas compté mes heures/jours….. j’ai probablement passé une bonne quinzaine de jours sur place, et j’ai quasi fini la partie électrique (mais pas commencé l’électronique). Je ne compte pas tout le temps passé a faire des schémas à la maison, à commander du matos, à faire des recherches. Mais je compte tout le temps passé à faire d’autres trucs (au hasard de la menuiserie), et aussi tout le temps perdu à régler des problèmes qu’un pro n’aurait pas eu (par exemple trouver le bon réglage du multiplus pour que la charge soit géré par le BMS en passant le cerbo GX (si vous n’avez pas compris cette dernière phrase ce n’est pas très grave)

A noter que je suis dans les conditions idéales :

  • le bateau est inhabité
  • il est complètement vide
  • il est dans un chantier avec plein d’outils à dispo
  • j’ai une addresse fixe pour me faire livrer du matos commandé sur internet.

Le même chantier en itinérance serait probablement beaucoup plus long, fastidieux et frustrant…. Et à vrai dire il serait probablement impossible à mener à bien.

Quels outils sont nécessaires ?

Bien sur je suppose que vous avez déja des tournevis, un mètre, une visseuse, un cutter, etc.

Je me focalise ici sur les outils spécialement dédiés à l’electricité

Les outils indispensables:

  • une sertisseuse hydraulique. j’avais pris un modèle bas de gamme a 60€, et elle fait finalement très bien le job y compris pour du 70mm2! Bien sur c’est un peu plus galère qu’une sertisseuse automatique, mais ce n’est pas le même budget 🙂
  • un décapeur thermique et de la gaine thermo-rétractable
  • une pince à sertir et des cosses qui vont avec
  • un voltmètre (si possible avec un pince ampèremétrique, utile pour savoir si il y a du courant qui passe sans tout démonter)

Les nice to have:

  • mon voisin m’a gentiment prété une imprimante d’étiquettes qui imprime également sur de la gaine thermo. Je crois que sans lui j’en aurai acheté une, tellement c’est pratique !
  • mon voisin m’a également prêté une caméra thermique. Super utile ponctuellement pour vérifier l’absence de points chauds (révélateur de mavuais sertissages/vissages) lors de la mise en service
  • devinez qui m’a prêté un machin pour passer les cables (ca s’appelle une aiguille tir fil et bien sur c’est encore mon voisin). Indispensable
  • un testeur de continuité, super pratique quand les electriciens précédent ont omis de marquer certains cables

Prochaines étapes

J’ai séparé le chantier global en 4 gros morceaux :

  • le stockage et la production (l’objet du prochain article).
  • le système spécifique 24v de la soute avant (propulseur et guindeau)
  • l’électronique
  • la distribution (seul domaine ou je garde une bonne partie de l’existant, mais il y a quand même pas mal de boulot

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